L’année 2019 s’en est allée dans un climat de morosité et d’incertitude. Les fractures sociales, politiques et environnementales qui se sont élargies dans les années passées confèrent une gravité toute particulière à celle qui s’ouvre de manière assez dramatique. Après les flammes de Notre-Dame, notre cœur souffre de voir celles qui ravagent la vaste Australie. Car si lointain est-il, ce drame nous rappelle que le compte-à-rebours de l’urgence climatique est déjà bien engagé.
En tant qu’acteurs de la société civile au service de l’intérêt général et des plus vulnérables, les fondations ont une grande responsabilité morale et opérationnelle pour faire face à ces défis. Certes, prises individuellement, elles représentent peu de chose, mais en agissant ensemble, elles peuvent contribuer à faire bouger des lignes, en soutenant l’innovation sociale, en abordant les sujets de manière systémique, en créant des alliances parfois inattendues, en privilégiant le temps long malgré les urgences, en faisant effet levier auprès d’autres acteurs, qu’ils soient privés ou publics.
Une décennie au nom de l’intérêt général
La Fondation Daniel et Nina Carasso a été créée en janvier 2010, il y a donc 10 ans. Une décennie au cours de laquelle nous avons essayé de prendre notre part des enjeux du 21ème siècle, à travers nos deux axes, l’Alimentation Durable et l’Art Citoyen. L’environnement, la santé, la citoyenneté, le développement de l’esprit critique, la démocratie participative, mais aussi les émotions, le plaisir, les saveurs, la culture… sont autant de mots qui se sont traduits en actions et en impacts concrets.
Depuis 10 ans, en France puis en Espagne, nous avons accordé 1 000 subventions pour un montant de 80 millions d’euros. Ces chiffres ne disent rien de la diversité et de la richesse des actions soutenues et nous vous invitons à en découvrir quelques-unes dans notre rubrique « Les projets ». Nos premiers vœux s’adressent ainsi à nos nombreux partenaires, aux femmes et aux hommes qui œuvrent chaque jour pour contribuer à créer un monde plus juste pour aujourd’hui et pour demain ; mais aussi à tous les experts bénévoles qui nous accompagnent – certains depuis 10 ans – et contribuent à rendre notre action la plus pertinente possible face aux nombreux besoins.
Une nouvelle stratégie en action
L’année 2019 a marqué le lancement de notre nouvelle charte graphique, mais surtout de notre nouvelle stratégie. Une stratégie au service des changements systémiques que nous souhaitons aider à provoquer : pour une transformation alimentaire respectueuse des personnes et des écosystèmes ; pour un rôle citoyen de l’art en tant que catalyseur des émotions et vecteur de questionnement sur notre société. Nous avons ainsi ouvert de nouveaux programmes, en co-construction avec des partenaires, comme PEGASE en France et PlanEA en Espagne visant la généralisation des arts à l’école. Nous avons poursuivi notre travail de réflexion et de prospective, par exemple avec la création d’un think tank de recherche pluridisciplinaire en Espagne dédié à l’alimentation durable et destiné à éclairer les décideurs ; mais aussi par la publication de nombreuses études commandées par la Fondation que nous vous invitons à découvrir dans la rubrique « Nos ressources » de chacun des axes. Nous avons également créé notre propre collection « Les Carnets Carasso » dont les deux premiers numéros ont été publiés en 2019 (La transition en actions n°2 ; Les Systèmes Alimentaire Territorialisés).
Nous avons ancré notre rôle d’activateur de réseaux et de plateforme d’échanges et de connaissance avec les 2èmes Rencontres de l’Alimentation durable, à Paris, et le séminaire Allez ! organisé en partenariat avec le MACBA, à Barcelone, sur les dispositifs mobiles de l’éducation artistique. Même si la Fondation a réduit le nombre de ses appels à projets, nous en avons reconduit certains comme « Composer les savoirs », dont les éditions française et espagnole furent des succès, et nous en avons ouvert de nouveaux comme « Obradores compartidos » et « Nourrir l’avenir ». Aux côtés des « pépites » issues de ces appels qui montrent la richesse des initiatives venues du terrain ou de la recherche, nous avons renouvelé notre confiance en 2019 à trois partenaires au cœur des croisements de la connaissance et de l’expérimentation : la Chaire Arts et Sciences portée par l’Ecole polytechnique et l’Ensad, la Chaire Unesco Alimentation du Monde portée par SupAgro Montpellier et le Cirad, et enfin la Chaire Philanthropie de l’ESSEC.
Nous avons poursuivi notre travail collectif avec les réseaux européens et internationaux, tout d’abord en acceptant la présidence du groupe EFSAF (European foundations for sustainable agriculture and food) au sein du Centre européen des fondations, avec lequel nous avons lancé une stratégie coordonnée d’action et de financement sur la réforme de la Politique agricole commune (PAC) ; mais aussi celle du groupe de travail « Climate and food systems » de la Global Alliance for the Future of Food. L’année 2019 a vu également la mise en place de nos deux nouveaux Comités d’orientation et de suivi, un comité franco-espagnol par axe, qui se sont réunis en décembre dernier à l’Abbaye de Royaumont. Nos experts ont d’ailleurs appelé la Fondation à plus de transversalité entre les deux axes.
Cette année a également vu le déploiement de notre portefeuille d’investissements à impact avec de nouvelles prises de participations via notre fonds dédié à l’alimentation durable en partenariat avec Quadia, mais également une prise de participation directe dans la société EducArte, filiale éducative d’Arte Développement. Avec une ambition renouvelée, notre stratégie vise une allocation de 15% de nos actifs dans des investissements à impact dont au moins 6% dans des participations visant la lutte contre le changement climatique.
Enfin, l’équipe de la Fondation, gemme indispensable à son rayonnement, s’est agrandie avec désormais dix collaborateurs en France et six en Espagne, sans compter notre précieuse « équipe étendue » composée de nos experts bénévoles et de tous les consultants qui nous accompagnent au quotidien.
2020, une année pour le climat
Pour 2020, la Fondation est bien entendu mobilisée pour poursuivre la stratégie mûrement réfléchie et préparée au cours de l’année 2018, mais elle s’est également fixée un nouveau défi. Face à l’urgence climatique, le Comité exécutif de la Fondation a en effet décidé de mobiliser des moyens financiers et du temps pour structurer une démarche collective des fondations au niveau national (France, Espagne) et au niveau européen. Elle sera bien entendu en première ligne pour adapter ses pratiques et ses programmes aux besoins qui auront été identifiés.
Malgré la gravité des enjeux, la Fondation est comme l’arbre de vie magnifiquement créé par l’artiste haïtienne Tessa Mars pour notre carte de vœux, pleine d’espoir, de graines à cultiver, de fruits à savourer, de bonheurs à partager, de connaissances à recueillir et à transmettre. Autant de racines, de graines, de feuilles, de fruits qui nourrissent le logo de nos 10 ans. Nous espérons que cet arbre, symbole de notre maison commune qu’est la planète terre, vous apportera la joie et l’émerveillement pour cette nouvelle année.
Marina Nahmias, présidente
Marie-Stéphane Maradeix, déléguée générale
